Je me souviens, dans ma jeunesse, que le football était un besoin quotidien. Un bout de bitume permettait de jouer à 3 contre 3 et un bout de pelouse nous offrait l’occasion de jouer plus nombreux. On ne pouvait pas attendre l’entraînement du mercredi et le match du dimanche. Les pulls et les sacs à dos servaient de poteaux et les rendez-vous pour taper le cuir avaient lieu tous les jours, surtout quand les journées s’allongeaient.
La gentrification de nos villes, et surtout à Paris, a chassé les classes populaires en « banlieues ». Là où il existe assez de place entre 2 Immeubles HLM pour jouer au football. Là où il y a encore des terrains vagues pour jouer au football. Là où le parking désert d’un centre commercial dominical permet de jouer au football. Aujourd’hui l’Île de France est le premier fournisseur de joueurs professionnels en Europe. Vous savez pourquoi ? Parce que la banlieue de notre chère capitale compte 8 millions d’individus et surtout parce qu’ils ont réinventé le jeu.
Plus assez d’infrastructures et d’équipements sportifs alors la jeunesse abandonnée des quartiers, des cités et donc principalement en « banlieues » s’est appropriée et a réinventé le foot (je le répète volontairement).
Un foot sans arbitre, ni entraîneur. Un foot où ce n’est pas le jeu collectif qui prime mais plutôt la fierté et le plaisir du beau dribble ou du beau geste. Il faut impressionner pour se réaliser, pour exister et se distinguer. Petit pont, roulette, virgule, aile de pigeon, passement de jambes ou talonnade permettent de faire sa place et de se faire remarquer. Le collectif n’est plus qu’un prétexte pour mettre en scène la technicité de chaque joueur via un ensemble d’actions de jeu purement esthétiques et inventives.
Street art et foot de rue, blanc bonnet et bonnet blanc : ils ont transformé un sport en œuvre artistique et l’Équipe de France peut leur dire merci… Même si c’est à travers le collectif que la victoire surgira toujours.
Et oui, place au déjeuner sur l’herbe avec nappe à carreaux…
Ah l’ironie de ma chère Anne, on ne sent lasse jamais 😉